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Camille de Cussac : « J’aime utiliser des couleurs très vives, denses, fortes. »

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Camille de Cussac (crédit photo : Sarah Baladhère)

Des peaux rouges, bleues, oranges ou violettes. Des couleurs vives et denses, des pieds à la tête. L’univers de l’illustratrice Camille de Cussac ne passe pas inaperçu.

Un art du détournement des codes qu’elle s’amuse à mettre en œuvre dans les albums jeunesse dont elle l’auteure ou la co-auteure, édités notamment chez Gallimard et Seuil Jeunesse. Passée par la prestigieuse École de Condé, Camille de Cussac n’oublie pas le rôle joué par sa grand-mère qui, selon ses termes, « a aiguisé son œil » en l’emmenant, enfant, dans les musées.

« Camille, l’agence avec laquelle vous travaillez, La Slow dit, à propos de vos créations, que votre monde est une joyeuse parodie du nôtre. Est-ce que vos illustrations sont pour vous un moyen d’accéder à une réalité augmentée ?

— Je me sers beaucoup de ce que je vois pour créer mes images. Je pars toujours de la réalité. Ensuite, je la tords un peu dans tous les sens. Je vais aller chercher des éléments qui me plaisent plus que d’autres, ou qui me font plus rire.   

J’adore prendre des éléments qui existent déjà et les transformer à ma sauce. Des personnages de livres. Des personnes célèbres. J’aime aussi redessiner des tableaux. Modifier le personnage principal. Cela m’amuse de me réapproprier les choses.   

Je travaille principalement à la main. Pour certaines commandes, je travaille avec un iPad. J’aime dessiner à la main. J’utilise des feutres. Une vingtaine de couleurs. Je trouve cela agréable d’avoir un nombre limité de couleurs à ma disposition. Lorsque l’on travaille sur ordinateur, on dispose d’un nombre illimité de couleurs, qui sont sublimes, mais je me perds un peu là-dedans. Je préfère avoir quelques couleurs dans ma trousse.

J’aime utiliser des couleurs très vives, denses, fortes. J’utilise assez peu souvent le noir. Les couleurs vives et denses sont celles qui me ressemblent le plus. Mes personnages ont souvent des peaux bleues, rouges, oranges ou violettes. Leur peau n’est jamais rose. Au départ, c’était une astuce. L’idée était d’utiliser ces couleurs afin que l’on ne puisse pas me reprocher d’utiliser une couleur inadéquate.   

Travailler à la main, sur du papier, me permet de mieux me rendre compte de la taille de mon dessin et de la composition. J’ai l’impression de voir d’emblée toute la composition à la bonne échelle, tandis qu’en travaillant sur ordinateur, je pourrais m’attarder sur des détails qu’au final on ne verrait pas. 

— Vous créez des albums jeunesse, que vous illustrez et dont vous écrivez les textes pour certains.  Quelles sont les spécificités de votre approche lorsque vous vous adressez à un jeune public ? 

— Lorsque je crée des albums jeunesse, ce que je trouve intéressant, c’est d’abord de mettre en place des images qui vont raconter une histoire, de créer une série d’images et de jouer sur le rythme de la narration. Ce qui m’amuse le plus c’est de dessiner une image qui va être une surprise par rapport à la page d’avant, Ceci afin que le lecteur ne s’ennuie jamais. Je joue notamment sur les cadrages, comme s’il s’agissait de cinéma, je fais des zooms par exemple.  

Dans mon processus de création, je ne réfléchis pas uniquement à ce qui va plaire aux enfants, j’essaie de mettre en place une histoire qui peut faire l’objet d’une double lecture. Je me dis que cela va faire rire ou va surprendre des personnes de mon âge, ou plus âgées que moi.   

D’une manière générale, je vais aller vers des histoires qui me plaisaient lorsque j’étais enfant et qui me plaisent encore aujourd’hui.   

Parfois, l’éditeur me demande certains ajustements. Il arrive que certains personnages soient un peu trop effrayants. Ces personnages font partie de mes albums, comme Barbe-Bleue (Barbe Blue le maudit Québécois, éditions Marcel et Joachim, ndlr) . Même si l’histoire de Barbe-Bleue me terrifiait quand j’étais enfant, je trouvais l’histoire de ce conte totalement incroyable. J’avais envie d’en créer une nouvelle version, que j’ai transposée au Québec. Cela me plaît de transposer des histoires très connues dans un nouvel environnement. 

— De quelle manière vous adaptez-vous à l’univers d’une marque avec laquelle vous travaillez, ou d’un événement, par exemple lorsque vous créez l’affiche d’un festival ?

— Pour créer l’affiche d’un événement, d’un festival, je pars souvent du lieu, de l’architecture, ou plus largement j’étudie la région. Je réalise un travail documentaire. Je me renseigne aussi sur les spécialités culinaires locales, par exemple. En fait, je m’intéresse à tout ce qui est représentatif d’un endroit. Ensuite, je crée différentes compositions que je présente aux personnes qui ont passé la commande. Je ne dirais pas que j’applique un processus ou une technique précise pour ce type de création.  

Lorsque je travaille pour une marque, de la même manière il ne s’agit pas pour moi d’appliquer une technique particulière. Par exemple, une marque de boulangerie m’a demandé de créer une composition pour ses boutiques, une fresque. Mon travail consistait à raconter une histoire. Mon client souhaitait montrer comment leur pain est fabriqué, parler des engagements de la boulangerie. À partir de cela, j’ai pu composer en toute liberté. Je me suis rendue dans les ateliers, ainsi que dans leurs trois boulangeries de Paris. J’ai pris des  photographies, en plus de celles que mon client m’a données. Je m’asseyais dans un coin, je regardais les clients. J’écrivais mon ressenti sur le moment. Je me suis aussi intéressée aux machines. J’aime beaucoup dessiner des machines. Elles deviennent presque des jouets. » 

Quelques albums jeunesse dont Camille de Cussac est l’auteure et/ou l’illustratrice :

  • Cheveux et autres poils, Gallimard Jeunesse.
  • Animaux sans queue ni tête, Seuil Jeunesse.
  • KO à Cuba, Éditions Thierry Magnier.
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